Ce lieu m’intéresse parce que je ne suis jamais rentré dans une synagogue. D’autre part, il s’agit d’une des plus grandes d’Europe. Enfin, j’apprends l’hébreu depuis quelques mois. Déchiffrer des inscriptions dans cette langue représente une stimulation intellectuelle.
La grande synagogue de Bordeaux : un édifice historique monumental
Je me trouve devant la porte d’entrée à l’apparence banale qui donne sur la rue Sainte-Catherine, près de la place de la Victoire. Je n’aurais pas pu imaginer qu’une synagogue se trouverait ici. À l’intérieur, j’aperçois au fond plusieurs grandes tables à manger dans une grande pièce. Près de l’entrée, je remarque un bureau, derrière lequel se tient une femme. Son accueil est sec. Elle ne semble pas enthousiaste de voir un visiteur. Comme si elle travaillait à la réception d’une administration publique. Elle m’accompagne jusqu’à la synagogue en passant par une petite cour intérieure et me donne un guide audio.
Le silence règne dans la salle. Lorsque je me rends compte que j’ai ce grand espace pour moi tout seul, je me sens privilégié d’être l’unique visiteur. En même temps, je suis déçu de ne pas pouvoir croiser d’autres personnes. Alors que j’avance dans le lieu, je sens une agréable odeur de produit nettoyant pour parquets mélangée à celles de renfermé et de vieux objets.
L’entrée principale de la façade par laquelle je n’ai pas pu rentrer se trouve dans une ruelle reliant la rue Sainte-Catherine au cours Pasteur. Je sors par la grande porte. Devant moi, je remarque une grille qui sépare le trottoir du parvis et évite ainsi que tout le monde puisse rentrer dans la synagogue de Bordeaux.
Je vois des passants dans la petite rue marcher sans faire attention à l’édifice impressionnant. Certains doivent penser que c’est une église. Au premier coup d’œil, on pourrait la prendre pour telle, car elle comporte 3 grandes portes en bois, surmontées de portiques ornés de motifs élégants. De plus, des vitraux laissent passer le soleil à l’intérieur. Cependant, des étoiles de David et des chandeliers à 7 branches sont gravés dans la pierre. En levant les yeux vers le haut du fronton, je remarque deux rectangles de pierre symbolisant les tables de la loi, une particularité des synagogues.
De nouveau à l’intérieur, je vois dans l’entrée un carrelage aux motifs géométriques colorés qui me plaît. Sur le sol, je remarque l’inscription « 1882 ». Il s’agit de la date de fin de la construction de la synagogue de Bordeaux. En apprenant que le carrelage est d’époque, je suis impressionné car je trouve le sol en bon état. Je n’aurais pas imaginé qu’il soit si vieux.
La synagogue est dite portugaise. J’écoute avec attention les explications du guide audio sur cet adjectif qui m’intrigue.
Pourquoi parle-t-on de « synagogue portugaise » ?
Lorsque l’Espagne expulsa les Juifs en 1492, l’année de la prise de Grenade, certains d’entre eux se réfugièrent au Portugal. Puis, en 1496, le roi du Portugal décréta que tous les Juifs devaient se convertir au catholicisme ou fuir. Une partie de ceux-ci arriva à Bordeaux. On appelle Juifs portugais ceux qui viennent d’Espagne ou du Portugal. Ils représentaient la majorité de la communauté juive de la ville au début du XIXe siècle. La décoration de la synagogue de Bordeaux est typique de celles construites par la communauté juive portugaise.
À l’écoute de ces faits historiques, je me dis que ce peuple a dû fuir de nombreuses fois les persécutions.
Un lieu de culte juif magnifique mais à l’atmosphère froide
Puis, je rentre à nouveau dans la pièce principale. J’admire de larges colonnes blanches qui s’élèvent jusqu’au premier étage où se trouvent des sièges. L’ensemble me rappelle un théâtre. C’est à l’étage que les femmes prennent place pendant les offices religieux. D’autres colonnes, de couleur rose clair, s’élancent jusqu’au plafond. Sur ce dernier, je remarque 7 arches élégantes.
Je passe devant des sièges en bois situés de part et d’autre d’une estrade, la tebah. C’est là qu’on psalmodie la Torah pendant les offices. Je vois, au centre de l’espace, une sorte de pupitre sur lequel le texte est posé pendant les psalmodies. Devant la tebah se dresse un chandelier à 7 branches illuminé, la menorah. Je suis impressionné par sa taille immense. J’avance vers le fond de la synagogue où se dresse une arche majestueuse d’inspiration orientale. La décoration soignée et riche, ainsi que les couleurs claires, me plaisent.
Soudain, une femme, qui doit être une personne pratiquante habituée des lieux, surgit. Elle est souriante, mais semble surprise de me voir. Elle me demande qui je suis. Je lui réponds que je visite la synagogue.
Cette rencontre me laisse penser que les visiteurs sont rares. De plus, je suis déçu par l’accueil froid. J’aurais imaginé que la personne chargée de l’accueil serait contente d’accueillir dans le temple une personne extérieure. Mais ce n’est pas ce que je ressens. Par ailleurs, j’aurais aimé rencontrer des habitués des lieux pour savoir comment ils se sentaient en tant que Juifs en France. Peut-être que la communauté est renfermée sur elle-même. En repensant aux persécutions que les Juifs ont subies, je me dis que ce serait compréhensible.
La synagogue ashkénaze : un lieu plus intimiste
Je me motive pour visiter la synagogue ashkénaze parce qu’il ne doit pas y en avoir beaucoup en France. J’observe de l’extérieur la maison qui contraste avec la grande synagogue portugaise. Je rentre et découvre une pièce unique dans laquelle je vois tout d’abord des vieux livres s’aligner sur des étagères. Les ouvrages et la petite taille du lieu donnent un caractère studieux à la synagogue qui me plaît. Avec ses sièges en bois devant et des deux côtés de la tebah, l’endroit me rappelle une salle de classe.
En admirant la décoration soignée mais simple, je me dis qu’elle fait écho avec le prétendu sérieux des peuples d’Europe de l’Est.
Une affiche en hébreu attire mon regard. J’admire ses lettres colorées aux formes élégantes. Je décide de lire ces phrases même si je ne les comprends pas. Je prononce une ligne à voix haute, puis, après avoir ouvert Google Traduction sur mon téléphone, je les lis à nouveau. L’outil de traduction automatique vocale donne un résultat qui doit être correct. « Prières en silence ». Je suis satisfait d’avoir réussi à déchiffrer quelques mots d’une langue dont je débute l’apprentissage.
Je sors de la petite synagogue, puis passe devant un groupe de femmes discutant autour des grandes tables dans la pièce à l’entrée. Dans la rue Sainte-Catherine, en me retrouvant dans le flot de piétons ininterrompu, je me dis que peu d’entre eux savent qu’une des plus grandes synagogues d’Europe se trouve à deux pas.
Avez-vous déjà visité une synagogue ? Qu’est-ce qui vous avait marqué ? Dites-le moi en commentaires !
La grande synagogue de Bordeaux se trouve au 6 rue du Grand Rabin Joseph Cohen, mais on entre par la rue Sainte-Catherine.
Elle se visite, sur réservation, du lundi au jeudi, à 14 h, 15 h et 16 h.
Vous trouverez toutes les informations pour préparer votre visite ici.
Je suis un bordelais de souche mais je ne connaissais pas ces monuments. Je manque probablement de curiosité mais la discrétion extérieure de ces lieux de culte, probablement volontaire, ne favorise pas leur découverte. Merci pour cette article qui donne envie de les visiter.
Je suis allé à Amsterdam dont les guides touristiques mentionnent deux vieilles synagogues (dont une portugaise) mais je n’ai pas pu les visiter.
Merci pour ce commentaire. J’ai aussi entendu parler de la synagogue portugaise d’Amsterdam mais je ne l’ai jamais visitée. Peut-être lors d’un prochain voyage !
J’ai eu le plaisir de visiter la Synagogue avec le Rabbin Emmanuel Valency il devait avoir environ 35 ans.
j’ai apprécié son ouverture et je me suis sentie accueillie contrairement à ce que tu as ressenti. Je pense qu’il avait peut-être une vision plus moderne de la religion. Par contre je n’ai pas visité la synagogue Ashkénaze…
https://www.sudouest.fr/culture/religion/le-rabbin-de-bordeaux-demissionne-2509888.php
Bonjour Françoise,
Merci pour ton commentaire intéressant. Cela doit être génial de visiter la synagogue avec un rabbin, j’imagine qu’il avait plein d’explications et d’histoires passionnantes à partager.