
Les grandes villes me fascinent. Que ce soit à Shanghai, New York ou Barcelone, l’énergie, l’animation et les stimulations offertes en permanence me plaisent. Par ailleurs, à l’ère de la mondialisation, je trouve intéressant d’identifier ce qui fait la particularité de chaque métropole.
Après 2 semaines dans le nord de la Grèce, j’ai passé 10 jours à Athènes pour découvrir son atmosphère et ses sites antiques. J’avais l’image d’une ville tentaculaire, polluée, dense et chaotique, mais son charme méditerranéen m’attirait. Voici les moments marquants de mon séjour dans la capitale grecque.
Prendre de la hauteur
Le train parti de Thessalonique arrive à Athènes en début de soirée. Je vais chercher mon vélo, que j’ai emporté avec moi pendant ce voyage d’un mois, dans une voiture dédiée aux marchandises. Elle me fait penser à un wagon à bestiaux.
La gare est petite pour une ville de cette taille. En sortant, je me dis que les bâtiments qui m’entourent sont en meilleur état qu’à Thessalonique.
Le trajet vers mon Airbnb me mène jusqu’à une longue ligne droite en pente. Dans ce col de montagne en pleine ville, je pousse sur mes jambes et avance en zigzag pour réduire mon inclinaison. De temps en temps, une voiture, arrivant d’en bas, me dépasse. J’arrive transpirant à l’appartement après avoir monté mon vélo à l’intérieur. Heureusement, le logement se trouve au 1er étage.
Dans ce studio, assis à la petite table nichée entre la kitchenette et le lit, le travail m’occupe pendant une bonne partie de la journée du lendemain. Ensuite, je parcours à pied la longue rue en pente en direction du centre-ville. Les reliefs me plaisent, d’autant plus qu’il y en a très peu à Bordeaux.
Le quartier contestataire d’Exarchia apparaît. Il a été le théâtre d’affrontements entre des manifestants et la police il y a quelques années. Sous le soleil, je parcours des rues piétonnes vivantes et végétalisées. Elles contrastent avec l’agitation et le tumulte des endroits empruntés jusqu’à présent. De nombreuses librairies et cafés donnent un aspect bobo au lieu. Sur les murs autour de moi, j’admire les nombreux tags. Beaucoup d’entre eux portent les couleurs noire et jaune du club de l’AEK Athènes. Par ailleurs, je remarque plusieurs immeubles condamnés, qui portent des planches visibles aux fenêtres.

Soudain, plusieurs policiers apparaissent, postés à des intersections. Ils ont l’air en alerte, alors que rien de notable ne semble se passer dans les environs. À côté se trouve une petite place dont l’accès est condamné par une haute colonne surmontée de barbelés. Sur Google Maps, la description du site est : « lieu de rassemblement de la contre-culture ».
Un peu plus loin, toujours dans le cœur d’Exarchia, une boutique remplie de livres m’intrigue. Il doit s‘agir d’une librairie ancienne. Ma curiosité et mon intérêt pour les vieux ouvrages m’incitent à pousser la porte. L’espace est étroit et peu profond. Je vois un homme assis à une table de travail, au milieu de la pièce, et un autre au fond, occupé à « recoudre » un livre.
Tout s’explique. Ils réparent des livres. L’homme assis parle bien anglais, ce qui me surprend étant donné son âge avancé. Il me montre du doigt des collections anciennes alignées sur une étagère. Puis, il me montre un petit livre d’un auteur français en version originale. Le titre et le nom de l’auteur me disent quelque chose mais je ne l’ai jamais lu.
Soudain, un homme élégant d’une soixantaine d’années, au visage doux, entre. C’est un ami du gérant. Il parle un peu moins bien anglais que lui, mais c’est suffisant pour échanger. C’est un ancien professeur d’université. Il enseignait la philologie, le grec ancien, le latin et la philosophie. Impressionnant !
Il me montre une affiche collée sur la porte d’entrée, qui montre un ouvrage, le sien. Je ne comprends pas le sujet. Ensuite, l’homme sort une boite de gâteaux qu’il a achetée à l’occasion de l’anniversaire de sa femme et le pose sur la table. Il me propose de piocher dedans.
Ensuite, les 2 Athéniens me donnent des conseils sur les lieux les plus importants à visiter, que j’ai déjà identifiés grâce à mon guide. Ils semblent ne pas trouver Exarchia belle, ce qui me surprend. Leur nom : Jean et Aristote, ou plutôt Yannis et Aristotelis. Ravi d’avoir échangé avec ces locaux, je continue mon chemin, sans réfléchir à ma destination.
Arrivé devant l’office de tourisme, qui se trouve au pied de l’Acropole, je constate qu’il est fermé de façon permanente. Incroyable pour une ville si touristique !
Pourquoi ne pas visiter la colline puisque je suis déjà sur place ? À un guichet, j’achète un billet combiné à 30 € qui donne accès à 7 sites antiques. En revanche, impossible de s’éterniser car je dois encore travailler aujourd’hui.
L’ascension commence. En levant les yeux, je réalise à quel point la colline est située en hauteur. Elle domine la ville, ce qui me donne envie d’arriver au sommet. Sur le chemin, il y a moins de touristes que ce que j’imaginais. J’ai du mal à me concentrer pour lire les panneaux donnant des explications sur les monuments. Il faut profiter et se détendre, arrêter de penser au travail pour observer l’environnement.
Un immense et sublime amphithéâtre apparaît. Quelle expérience cela doit être de jouer ici ! Un panneau m’apprend que les dramaturges grecs, comme Sophocle et Euripide, ont écrit des œuvres interprétées dans ce lieu. L’enchaînement des événements qui ont jalonné l’histoire de l’Acropole est flou dans ma tête. Je retiens que la plus grande partie des monuments datent du « siècle de Périclès », le Ve avant J.-C. J’avais écouté un épisode d’un podcast historique sur cette période.
En franchissant la « porte » majestueuse de l’Acropole, je sens une ambiance spirituelle et apaisante. On a l’impression d’être hors du temps, coupé de l’agitation et de la modernité de la ville. La position surélevée du site y est pour quelque chose. Je rejoins une file de touristes et dois ralentir le pas. Les mots en langues étrangères des visiteurs me donnent l’impression d’être dans la tour de Babel.
Le chemin mène jusqu’au Parthénon, dont la taille immense m’impressionne. Je remarque que je suis plus détendu et que je profite du moment, sans essayer de comprendre l’histoire de tout ce qui m’entoure.

Ensuite, je fais le tour du temple puis j’admire l’Érechthéion. Les panneaux explicatifs m’apprennent que plusieurs statues de femmes qui soutiennent le toit de l’édifice sont des copies, les originaux ayant été déplacés car fragilisés, notamment par la pollution. Il est difficile de croire que ce ne sont pas des vraies. Je sors de l’Acropole vers 17h et suis le flux des touristes sur un sentier menant à une autre petite colline.
Je me pose sur un rocher puis admire la ville, sous le soleil couchant. J’aimerais partager ce moment avec d’autres personnes. Ce sentiment de solitude n’était pas apparu lors de mes précédents voyages en solo. Pourtant, je viens de passer une semaine en compagnie de mon hôte de WWOOFing et de ses amis, en Chalcidique.

Après 1h de marche, me voilà de retour à l’appartement, où je travaille jusqu’à tard le soir.
De la Grèce classique à l’époque romaine
Le lendemain, je me lève vers 9h, après une nuit de fête, puis m’assois sur un banc, dans le quartier de l’appartement, pour écrire. Devant les murs tagués, des habitants marchent, leurs courses à la main. Et par terre, je vois des déchets plastiques.
Ensuite, sur mon vélo, je descends vers l’agora grecque, un grand espace qui se prête à la promenade, au milieu des arbres et des ruines antiques. Il y a plus de 2 000 ans, le cœur de la cité devait fourmiller de monde et un bouillonnement commercial et artistique y régnait sans doute.
Des mots sur les panneaux me rappellent mes cours de grec ancien au collège. Parmi eux, la boulê, qui désigne l’assemblée de citoyens, et la voie panathénaïque, sur laquelle avaient lieu les processions en hommage à Athéna, tous les 4 ans. Celle-ci mène jusqu’à l’Acropole.
Périclès, le bâtisseur de la démocratie
Au Ve siècle avant J.-C., l’homme d’État athénien Périclès restaure ou reconstruit de nombreux bâtiments de l’agora, détruite en 480 av. J.-C lors de l’invasion perse. Parmi eux : le temple d’Héphaïstos et la voie panathénaïque. Le dirigeant a aussi fait ériger le complexe de temples sur l’Acropole. Pendant cette période, surnommée le siècle de Périclès, la cité était à son apogée. Les arts rayonnaient et une grande importance était accordée à la liberté et à la démocratie.
À gauche de l’entrée, un long bâtiment, un portique, attire mon regard. Ses colonnes sont majestueuses. Elles créent des ombres parfaitement espacées sur le sol. Il s’agit du stoa d’Attale.

Mes paupières se ferment. Après être passé devant la boulê, je rejoins le temple d’Héphaïstos, le dieu des forgerons. Quelle merveille ! C’est l’édifice datant de la période de la Grèce antique le mieux conservé que j’ai vu jusqu’à présent. Je distingue plusieurs séparations des parties intérieures, depuis le chemin de visite.
Il est temps de repartir se reposer. Mauvaise surprise, je ne trouve pas mon vélo. J’aurais dû prendre une photo à l’endroit où je l’ai attaché. Ce manque de précaution m’énerve. Après avoir marché dans le quartier de Plaka pendant 20 minutes, je le vois.
La bibliothèque d’Hadrien est en haut de ma liste de lieux à visiter car j’aime le livre Mémoires d’Hadrien, de Marguerite Yourcenar. L’empereur était, comme Périclès avant lui, un bâtisseur. Le site, qui fait partie des 7 visites du billet combiné, est situé en plein centre de la ville.
À l’entrée, j’admire de belles colonnes corinthiennes. Cependant, l’endroit m’intéresse peu et je suis assez déçu de constater qu’il n’y a pas beaucoup de restes visibles du bâtiment construit par l’empereur au IIe siècle après J.-C. Au fond de l’espace se dresse un haut mur bien conservé, près de l’endroit où étaient entreposés les papyrus, par dizaines de milliers. J’imagine l’atmosphère d’érudition et le silence qui devaient y régner il y a 2 000 ans.

Un autre site du billet combiné associé à Hadrien est sur ma liste : l’Olympeion. L’empereur a achevé sa construction, débutée au VIe siècle avant J.-C. Cela montre l’intérêt qu’il avait pour la culture grecque. C’est comme si Emmanuel Macron finissait de construire un monument datant de la Renaissance.
Le site est vaste et dégagé, mais situé au bord d’une avenue empruntée par de nombreuses voitures. J’admire, depuis le chemin qui passe au milieu de l’herbe, le temple dédié à Zeus. Sa grande taille et une colonne, allongée par terre depuis qu’une tempête l’a fait tomber au XIXe siècle, attirent ma curiosité.
Le Keraemikon est le site inclus dans le billet combiné qui m’attirait le moins. L’entrée me fait penser à un petit jardin ombragé. Il y a une petite bâtisse qui sert d’accueil et un bâtiment plus grand, un musée. Le sens de la visite m’éloigne de ces édifices pour me faire pénétrer sur un sentier. Plus exactement, ce sont plusieurs sentiers qui vont vers l’espace où des arbres se dressent. Le lieu, assez grand, est un havre de paix. Je me balade au milieu de pans de mur. Ils datent du VIe siècle avant J.-C., c’est-à-dire avant l’âge d’or d’Athènes. L’enceinte protégeait la cité sur environ 10 km.
Les restes de 2 portes se trouvent là. Il est toujours impressionnant de voir des pierres si vieilles. De l’herbe pousse entre les blocs, ce qui me rappelle le mur des lamentations, à Jérusalem.
Soudain, j’entends un petit bruit aigu qui vient d’un arbre feuillu. La tête levée, je distingue une petite forme d’un vert éclatant. Il ressort dans le ciel d’un bleu intense en arrière-plan. On dirait un perroquet, mais sa petite taille ne semble pas correspondre à cette espèce. J’hésite à aller parler à une personne qui surveille les lieux, au sujet de cet oiseau fascinant. À nouveau, j’ai envie de partager mon expérience. Finalement, je ne vais pas discuter avec lui, même si cela n’aurait été que pour échanger quelques mots. Tant pis, je poursuis mon exploitation de ce grand jardin.
Parmi les nombreux petits arbres qui cohabitent avec les ruines, j’en remarque plusieurs avec des petits fruits rouges ou jaunes. Ce sont des kurkura, le fruit que j’avais cueilli en quantité lors d’une randonnée à Sithonie la semaine dernière. Je tends le bras et en prends quelques-uns à ma bouche. J’ai la sensation d’avoir accès à une connaissance particulière que les autres touristes n’ont pas : le nom de cet arbre. Cela a été rendu possible par mon expérience de Wwoofing lors de laquelle j’ai rencontré des locaux.
Ensuite, direction le musée de Kerameikon. Il explique les différentes périodes qu’a connues la ville. J’aurais aimé commencer mon séjour à Athènes par une visite du lieu. L’exposition m’apprend que les nombreuses tombes qui se trouvaient ici étaient décorées. Les explications sont claires et les objets présentés remarquables. Par exemple, des urnes, vases et bijoux accompagnent les morts dans leur sépulture. Kerameikon est, avec l’Acropole, le site du billet combiné qui me paît le plus.
Je fais aussi un tour rapide au lycée d’Artistote. Le site, couvert en partie d’herbe, a un aspect naturel. Il ne reste qu’un petit nombre de parties basses des murs du gymnase, derrière lesquels les jeunes hommes pratiquaient des activités physiques.
Le vélo à Athènes, une activité à contre-courant
En rentrant à l’appartement à vélo, je me rends compte à quel point la ville est polluée. Je sens l’odeur des pots d’échappement et esquive les véhicules. De nombreux endroits sont hostiles aux cyclistes, qui sont très rares. Par ailleurs, il n’y a presque aucune piste cyclable. Cependant, rouler me fait gagner du temps et m’offre de la flexibilité.
Un jour, je vois la longue ligne droite en pente abrupte annonçant que j’approche de mon appartement. 2 voitures se trouvent derrière moi, alors que je grimpe en zigzag. Les occupants doivent être surpris de voir un cycliste ici. Je tourne pour me placer derrière une des nombreuses voitures garées sur les deux trottoirs. L’omniprésence des véhicules motorisés dans les rues me rappelle qu’un habitant m’avait dit que se déplacer en voiture était très répandu. Lui-même se plaignait du temps passé dans les bouchons.

Une fin d’après-midi, je me balade dans Psyri. En voyant les petits cafés et boutiques tendance, je me dis que le quartier devient bobo mais est attrayant. Les graffiti défilent devant mes yeux. C’est un des atouts d’Athènes : des œuvres de street-art, exprimant souvent une contestation, donnent une âme à la ville.
Ensuite, je marche jusqu’au quartier limitrophe de Monastiraki, qui accueille un bazar. C’est une sorte de centre commercial comptant de nombreux petits magasins indépendants. En particulier, une brocante me fait penser au Dénicheur, en plus grand. Je vois notamment des casques datant de la Deuxième Guerre mondiale.
Je décide d’aller parler à un homme qui fait du rangement : « J’ai hérité de cette boutique de mon père. 20 % de ce qu’on trouve ici est grec, le reste vient du monde entier ».
Je pourrais passer plusieurs heures ici, mais où pourrais-je placer les objets ? Étant donné qu’ils sont anciens, ils ne seront pas accordés avec la décoration de mon appartement.
Sur le trajet jusqu’à mon logement, je remarque que je commence à mémoriser l’itinéraire. Plus besoin de tenir mon téléphone en permanence pour m’orienter.
Les moments que je passe à l’appartement sont dédiés au travail ou aux repas. Ces deux activités occupent de grandes parties de mes journées. Il faut l’accepter quand on décide de mêler voyage et travail à distance. Cependant, j’évite de me mettre la pression pour voir beaucoup de sites à Athènes. Au-delà des endroits visités, ce sont les rencontres et les échanges qui font la beauté des séjours à l’étranger.
Découvrir la vie d’expatrié
Pour changer de cadre de travail, je vais un jour dans un café dans le centre. L’endroit, fréquenté par de nombreux télétravailleurs, est animé. Beaucoup d’entre eux parlent anglais.
À ma gauche, des mots en français se font entendre. J’entame la conversation avec le jeune homme. Il habite à Exarchia depuis quelques mois et travaille à distance pour une entreprise étrangère. Je trouve ce mode de vie attrayant, notamment parce que le pays en question est ensoleillé. Il se plaît ici, malgré le manque de fiabilité des services publics grecs. M’expatrier à Athènes me permettrait de profiter des attraits d’une grande ville, comme le dynamisme culturel et les opportunités de sortie.
Quelques jours plus tard, je trouve le Français, Bastien, à Exarchia, pour prendre un verre. Je découvre une facette du quartier différente de celle observée pendant ma 1re visite. Dans les rues en pente, je vois des bars modernes, à la décoration soignée, croise des expatriés et remarque peu de tags sur les murs. On pourrait se croire dans le quartier gentrifié d’une autre ville européenne. Cela manque d’authenticité.
Le quartier de Gazi, qui accueille de nombreux bars et boîtes, est différent. J’ai l’impression qu’il n’y a rien à y faire en journée. L’ambiance de fête me plaît et je constate que les Grecs profitent de la vie, malgré les difficultés économiques qu’ils traversent. Plus européenne que Thessalonique, je trouve Athènes dynamique et ouverte d’esprit.
Un meet-up d’écriture « Just write » a lieu au Pirée pendant mon séjour. Voilà une bonne occasion de faire autre chose que des visites de sites antiques. Je n’avais pas prévu de me rendre au port d’Athènes car il n’y a pas grand-chose à y voir d’après mon guide. Sur place se trouvent une dizaine de participants, grecs ou expatriés. Je suis le seul de passage dans la ville.
Le concept de la réunion « Just write » est que chacun écrit, dans le cadre d’un projet personnel ou professionnel, pendant 1 heure. Il n’y a pas d’échange pendant la phase d’écriture. Sans être interrompu, je rédige la moitié d’un article de blog sur la terrasse du café. Quel concept génial !
Ensuite, les participants se présentent puis échangent. J’en profite pour en savoir plus sur la vie des expatriés à Athènes. Ils semblent ravis d’habiter ici. Un d’eux, un Américain, est un digital nomad et ghostwriter qui a décidé de se poser ici sur le long terme après avoir vécu dans de nombreux pays.
– « Où as-tu vécu ?
– La question est : “Où est-ce que je n’ai pas vécu ? Bulgarie, Italie, Amérique du Sud…” »
C’est fascinant, mais je ne pense pas que ce soit pour moi. Il doit être difficile de nouer des relations avec des gens sur le long terme. Par ailleurs, mon mode de vie actuel, qui me permet de voyager 2 à 3 fois par an tout en travaillant, est plus appréciable. D’ailleurs, Jake, un Américain qui vit ici depuis quelques mois, me dit à la fin du meet-up : « Enjoy your travels bro ».

Une colline pour respirer
Les halles sont le plus grand marché de la ville. Quand je pénètre dans le bâtiment, vers 8h, il y a peu de clients. Les espaces dédiés à la viande sont séparés de ceux où on vend le poisson. Environ une dizaine de stands de produits de la mer et des dizaines de stands de bouchers occupent l’espace. Comment font-ils pour se différencier s’ils vendent les mêmes produits ?
Plusieurs marchands me parlent, d’une voix forte, pour m’inciter à acheter. Je remarque que les carcasses des moutons, lapins et autres cochons, sont exposées sur les stands. On n’essaie pas de les mettre en valeur. Cette quantité de viande me dégoûte.
Après avoir travaillé dans le café où se trouvent les nombreux télétravailleurs, je mange mon casse-croûte, composé de légumes crus et de fromage, à côté du marché des primeurs. Il se trouve de l’autre côté de la rue, en face des halles. Ces étals sont plus appétissants.
Je retourne aux halles le dernier jour de mon séjour, en fin de matinée, pour profiter de l’ambiance animée des marchés que j’apprécie. En entendant depuis l’extérieur les cris des marchands, je me dis que les lieux sont plus fréquentés que la dernière fois. À l’intérieur, ma progression est lente. Les stands des poissonniers proposent une grande quantité de produits qui, j’imagine, proviennent de la mer Égée.

Un petit bar, situé dans l’allée qui relie les deux ailes du bâtiment, m’accueille pour le déjeuner. On m’assied entre une table d’un boucher sur laquelle se trouvent des déchets de viande et un homme d’une soixantaine d’années qui mange sur le pouce. Les bouchers, vêtus d’habits blancs maculés de sang, s’agitent. Un groupe de touristes israéliennes élégantes, qui mangent dans des assiettes commandées au bar où je me trouve, semblent ne pas apprécier cet endroit sale et désorganisé. Au contraire, je profite du moment en observant les allées et venues des patrons, dans une atmosphère agitée et conviviale. On dépose sur le zinc une assiette contenant une grande variété de produits : moules, crevettes, petites sardines ou anchois, feuilles de vigne farcies, olives, tomates et petits piments.
Après ce repas délicieux, je me rends à la colline de Philopappos, située à proximité de l’Acropole. J’y ai donné rendez-vous à Yiannis, un Grec rencontré en Chalcidique. Il a grandi à Athènes, où il possède toujours une maison, mais vit à Sithonie. Il a décidé de changer de vie il y a quelques mois pour devenir jardinier dans un hôtel, afin de se rapprocher de la nature. Auparavant, Yiannis était comptable. Son parcours me fascine car il montre qu’on peut prendre ce genre de décision même à 50 ans passés.
Je laisse mon vélo sur le parking à l’entrée du parc. Au bout du sentier entouré de petits arbres et arbustes, au sommet, la vue sublime sur l’Acropole se dévoile. Je me retourne et ne vois que des rues, avenues, immeubles et voitures. On dirait que chaque m2 de terrain a été construit, là où, il y a quelques siècles, il ne devrait y avoir qu’un décor naturel typiquement méditerranéen. Un bourdonnement venant d’en bas accompagne ce tableau. Au loin, je remarque le Pirée et la mer Égée. Des îles parsemées sur l’étendue bleue attirent mon regard. Cela donne envie de les rejoindre.

Je m’allonge par terre pour reposer ma cheville, victime d’une entorse survenue il y a 2 semaines. Prendre soin de ma santé est le plus important, et cet endroit est idéal pour cela.
Soudain, une petite tortue apparaît sous mes yeux. Elle progresse sur le sol sec et rocailleux. 2 touristes sont aussi fascinés que moi. Ils la prennent en photo, sûrement pas habitués à en voir dans leur pays.
Un moment de partage
À ce moment-là, Yiannis arrive. Lorsque je lui raconte ma rencontre avec l’animal, il hausse les épaules. Il doit avoir l’occasion d’en voir, même à Athènes. Par ailleurs, il ne semble pas réaliser qu’il est rare d’en voir en France. Nous descendons le chemin puis retrouvons le béton et l’agitation.
10 minutes plus tard, nous voilà au musée de l’Acropole. Le bâtiment est grand et a une décoration épurée. Je marche d’abord au milieu des habitations qui ont été découvertes lors de la construction de ce musée récent, à l’extérieur.
Ensuite, dans l’édifice, je remarque des maquettes qui présentent l’aspect de la colline aux différentes périodes de l’Histoire. Puis, un escalier débouche sur un large espace présentant des collections anciennes. Le Grec, qui s’intéresse à l’Histoire et aux arts, me fait des commentaires sur plusieurs pièces. Ils sont appréciables car je suis trop fatigué pour me concentrer sur les explications écrites. Même s’il a visité le site à de nombreuses reprises, il regarde avec intérêt ce qui se trouve derrière les vitres. Je comprends qu’il apprécie de partager son savoir avec moi.
Au dernier étage, il y a une restitution grandeur nature du Parthénon, où les éléments d’origine qui ont disparu sont représentés. Certains se trouvent actuellement au British Museum de Londres, un sujet de discorde entre Grecs et Britanniques.
Je suis reconnaissant envers Yiannis de m’avoir accompagné. Ensuite, nous allons nous promener, après le coucher du soleil, dans le quartier d’Anafiótika, niché contre les flancs de l’Acropole. Il touche Plaka, mais est peu touristique. En tout cas, personne ne se trouve dans les rues escarpées. J’admire les petites maisons blanches qui me paraissent typiques des iles grecques, comme Santorin. Découvrir cette architecture dans la grande capitale est une belle surprise. Je profite de la vue sur la cité illuminée en contre-bas. C’est sans doute le quartier d’Athènes qui me plaît le plus.
Lorsque nous nous quittons, Yiannis, me dit qu’il est jaloux de ma liberté. J’ai travaillé pour l’atteindre, en échangeant du temps dédié à la découverte de la ville par des heures derrière mon ordinateur à l’appartement ou au café. De plus, le voyage en Grèce m’a demandé de l’organisation et des moyens financiers.
Partir d’Athènes me procure un sentiment de soulagement, car je quitte l’appartement exigu et peu confortable. Les longs trajets à vélo au milieu de la circulation automobile ne vont pas me manquer non plus. Cependant, l’atmosphère de liberté et l’offre culturelle sont appréciables.
Avez-vous déjà séjourné à Athènes ? Qu’en avez-vous pensé ? Dites-le en commentaire !