![Tente d'un cycliste hébergé via Warmshowers en Italie](https://pierrelereporter.com/wp-content/uploads/2025/01/20241103_070428-1024x768.webp)
Couchsurfing, WWOOFing, Warmshowers : ils ont tous un point commun. L’argent y est proscrit. En d’autres mots, ces concepts reposent sur l’entraide et l’échange.
Et en tant qu’amateur de voyages en itinérance à vélo, j’ai tout de suite été attiré par le réseau Warmshowers quand on m’en a parlé, car il s’adresse aux cyclistes amateurs. Finalement, j’ai sauté le pas peu avant de partir en Grèce.
Découvrez comment fonctionne la plateforme Warmshowers et quelles rencontres elle m’a permis de faire.
Warmshowers : ce que c’est et pourquoi j’ai décidé de l’utiliser
Warmshowers a été fondé en 1993 par les Canadiens Terry Zmrhal et Geoff Cashman. La mission de cette organisation à but non-lucratif, basée dans le Colorado : mettre en relation des cyclotouristes en voyage et des hôtes. Il s’agissait initialement d’une base de données de personnes prêtes à accueillir des cyclotouristes, devenue un site Internet en 2005. La plateforme regroupe une communauté de 180 000 cyclistes et hôtes dans le monde.
Ce service d’hébergement est gratuit, mais une inscription payante est obligatoire pour pouvoir chercher et contacter des membres sur le site.
Lorsque j’ai décidé de passer un mois en Grèce, en télétravaillant, j’ai fait le choix de m’y rendre sans prendre l’avion. Cet exemple de slow travel, en train, bus et ferry, rimait avec aventures riches et possibilités de vivre plusieurs voyages en un seul, mais aussi avec budget de transport conséquent. Pour compenser, je devais dépenser le moins possible en hébergements. C’est pour cette raison que ce service me paraissait adapté ; je n’aurais rien à payer en échange d’une place dans un canapé.
Par ailleurs, l’idée d’aider un inconnu, sans impliquer d’argent, me séduisait. L’hospitalité légendaire des cyclistes est un atout de cette communauté, et je voulais l’expérimenter, à la fois en tant qu’hôte et invité.
Une autre motivation était la possibilité de faire de belles rencontres. Je voyais Warmshowers comme un moyen de découvrir la culture d’un pays et d’en apprendre plus sur une région, à travers les échanges avec les locaux.
![Site Warmshowers : hébergement gratuit pour cyclistes](https://pierrelereporter.com/wp-content/uploads/2025/01/Capture-decran-2025-01-10-a-22.41.50-1024x468.webp)
À la recherche de mes hôtes
3 semaines avant mon départ, je paye 30 $ pour valider mon inscription sur le site. Celui-ci est disponible en français et en 4 autres langues.
Je remplis mon profil en renseignant les informations suivantes :
- Photo de profil
- Présentation de moi-même
- Capacités d’hébergement dans mon logement : je choisis de mettre à disposition le canapé de mon salon et ma douche, et de proposer un repas aux cyclistes
- Mode de voyage : il y a 3 modes : « disponible », « en voyage, non-disponible en tant qu’hôte » et « non disponible en tant qu’hôte ». Je prends la 2e option, étant sur le point de partir en Grèce.
Ensuite, j’ouvre la carte qui recense les hôtes pour chercher un hébergement à Milan, où j’allais arriver en bus tard, le jour de mon départ. Une dizaine de profils apparaissent. Sur chacun, il y a les informations suivantes :
- Activité : la personne s’est-elle connectée dans les 30 derniers jours ?
- Mode de voyage : l’hôte peut-il recevoir des voyageurs ?
- Expérience : la personne a-t-elle déjà hébergé ou été accueillie via Warmshowers ?
- Avis des autres utilisateurs : une note et des commentaires des hôtes et des invités indiquent comment se sont passés les séjours précédents.
J’envoie une première demande à une personne vivant près de la gare routière de Milan. Excellente surprise : celui-ci me répond qu’il est disponible pour m’accueillir, malgré mon arrivée tardive.
En revanche, sur la carte de Bari, d’où mon ferry pour la Grèce partira, je ne vois qu’un seul hôte disponible. Il me répond qu’il ne sera pas sur place lors de ma venue. Ensuite, j’élargis mes recherches et tombe sur un profil à Foggia, une petite ville située à quelques dizaines de kilomètres de ma cible. L’hôte, Antonio, est actif et a de nombreux avis, tous positifs. De plus, son hébergement est attirant : un jardin à la campagne, où on peut poser sa tente. J’admire les arbres fruitiers et les pins sur les photos postées par les précédents invités.
Quelques heures après lui avoir envoyé ma demande, je reçois une réponse positive. Cependant, étant donné qu’il ne sera pas présent le jour J, je ne croiserai personne. Il m’enverra les instructions pour entrer peu avant mon arrivée, via WhatsApp. Je savais que l’entraide et l’hospitalité étaient marquées chez les cyclistes, mais pas au point d’inviter un inconnu chez soi sans être sur place.
Maintenant, il est temps de chercher des hôtes en Grèce. Mon ferry de Bari arrivera à Igoumenitsa. Aucun profil visible dans cette zone. En élargissant ma recherche, je remarque 3 hôtes dans les environs de la ville de Janina. Y aller à vélo, ou éventuellement en bus, depuis Igoumenitsa ? Je n’ai pas le temps, car il faut que je travaille à distance dès le lendemain de mon arrivée. Par ailleurs, visiter cette région m’intéresse peu.
Mes recherches se portent ensuite à Thessalonique, une ville que je veux visiter. Il y a très peu de résultats. Parmi eux, un hôte ne répond pas à mon message, et un autre me dit qu’il ne sera pas chez lui lors de mon arrivée.
Ensuite, je vois une personne disponible, plus au nord de la grande ville. Il n’a pas assez de place dans son appartement, mais me propose de planter ma tente dans le jardin de son père. Cette hospitalité me ravit, mais l’option me paraît peu adaptée à mes projets, car il sera difficile d’aller jusqu’à chez lui en bus. Par ailleurs, cela prendrait trop de temps à vélo.
En élargissant mes recherches à d’autres régions de Grèce, je trouve un profil vivant près des Météores. Il attire mon attention car j’avais remarqué dans mon guide de voyage cette magnifique région de montagnes, célèbre pour ses monastères orthodoxes. La personne me répond qu’elle ne sait pas encore si elle sera là début novembre et me demande de la contacter peu avant mon arrivée.
La date de mon départ approche et je n’ai toujours pas trouvé d’hébergement en Grèce. Tant pis, je me paye un emplacement pour tente dans un camping à Igoumenitsa et réserve un logement sur Airbnb à Thessalonique pour le début de mon séjour. De plus, un hôte WWOOFING, vivant en Chalcidique, une région située à proximité de la grande ville, accepte de me recevoir pendant une semaine.
Accueillir un inconnu à la maison
Une semaine avant mon départ, je reçois une demande d’hébergement. C’est une surprise, mon statut étant « indisponible ». C’est l’occasion de rencontrer un cycliste !
Ma joie grandit lorsque j’ouvre son message : le voyageur est israélien, et j’ai passé un mois dans le pays l’année dernière.
Son message m’apprend que c’est un pilote de ligne à la retraite qui passe une grande partie de son temps à voyager à vélo. Je remarque de nombreux avis sur sa page de profil, ce qui me laisse penser qu’il utilise Warmshowers depuis longtemps. J’accepte sans trop réfléchir.
2 jours plus tard, Avner est devant mon immeuble. En le voyant, vêtu d’habits de sports et équipé d’un vélo chargé de 4 sacoches, je me dis qu’il est expérimenté.
– « D’où es-tu parti ce matin ?
– De Bergerac. Je suis arrivé en fin d’après-midi à Bordeaux. Tu viens du travail ?
– Oui, et je me suis arrêté faire des courses pour ce soir.
– Merci, sinon, je t’aurais invité au restaurant. »
Dans mon appartement, il déballe le contenu de ses sacoches dans mon salon, sur le canapé où il va dormir : « Une des choses les plus pénibles lors des voyages en itinérance à vélo est de sortir et de ranger ses affaires tous les jours. »
Accueillir chez moi gratuitement un inconnu me rend heureux. Par ailleurs, notre échange m’enrichit. Il a traversé les États-Unis d’est en ouest, fait du vélo en Amérique du Sud et a parcouru de longues distances en Europe. Son périple actuel le mène de Paris jusqu’à Saint-Jacques-de-Compostelle, voire au Portugal. Par ailleurs, quand il me dit qu’il a plus de 70 ans, je suis impressionné et admiratif. Je veux pouvoir faire la même chose lorsque j’aurai son âge.
Avner dort en camping, en hôtel et, parfois, chez des hôtes connus via Warmshowers. Cependant, il trouve peu d’hébergement en France via la plateforme. Ou plus exactement, il reçoit peu de réponses lorsqu’il contacte des gens. D’après lui, le niveau d’adoption du site est très varié, d’un pays à l’autre. En Allemagne, par exemple, il est plus facile qu’en France de trouver des hôtes.
Après avoir échangé sur nos vies respectives, nous discutons de la suite de son voyage. Je lui montre comment rejoindre la piste cyclable de Bordeaux à Lacanau, demain. Ensuite, il empruntera la Vélodyssée, jusqu’à Hendaye.
Le lendemain matin, après avoir partagé le petit-déjeuner, nous sortons de l’appartement ensemble. Avner part en direction de la cote, et moi, vers le centre-ville de Bordeaux.
Les Pouilles comme 99 % des touristes ne les verront jamais
Après cette première expérience réussie, la veille de mon départ, je reçois un message du Milanais qui devait m’héberger. Il m’informe qu’il ne pourra pas m’accueillir, à cause d’un imprévu familial. Panique. Je contacte tout de suite tous les hôtes que je vois à Milan, y compris ceux qui sont indisponibles, sans réponse.
Quelques heures plus tard, les instructions de mon hôte à Foggia, Antonio, pour entrer dans son jardin, me parviennent. Une vidéo montre comment récupérer la clé du portail. Il me dit aussi où je peux trouver de l’eau et de la nourriture à proximité. De plus, je pourrai prendre autant de fruits que je veux dans son jardin. Il me dit qu’il y a des figues à cette saison, mais, en novembre, cela paraît surprenant. Le message enregistré doit avoir été écrit il y a plusieurs mois.
Le jour J, dans le train Bordeaux-Paris, j’écris à Avner, un de mes derniers espoirs de trouver un hébergement à Milan. Avec un peu de chance, ce grand voyageur connaît quelqu’un sur place. Il me dit qu’il va demander à une de ses filles, qui a vécu dans la ville il y a plusieurs années, si elle a des contacts. Cependant, en fin de journée, dans le bus de Lyon à Milan, je reçois une réponse négative.
Je préfère passer la nuit à Milan sans hébergement, pour ne pas alourdir mon budget. De plus, réserver un hôtel serait une solution un peu facile, alors que je fais ce genre de voyages pour l’aventure.
Arrivé après minuit dans la cité lombarde, je me mets en selle et roule vers le centre-ville. Je décide de me balader à vélo, sans but, puisqu’il y a plusieurs heures avant que la gare n’ouvre ses portes.
Si je devais décrire la ville en un mot, ce serait : « monumentale ». Les beaux bâtiments et monuments emblématiques illuminés se dévoilent. Je m’arrête devant le sublime Duomo, puis je passe devant plusieurs édifices imposants. Les piétons se font de plus en plus rares et les discussions que j’entends de moins en moins discrète.
Mon vélo sursaute sur les larges pavés qui couvrent les rues. Moi, le Bordelais habitué aux aménagements cyclables confortables, je me dis que ce n’est pas une ville idéale pour les cyclistes.
Vers 3h du matin, alors que la fatigue commence à se faire sentir, je vois une petite pelouse déserte derrière une basilique. L’endroit est abrité de la vue par des arbres, mais la présence d’un groupe de jeunes personnes bruyantes à proximité me fait douter. Qu’est-ce qu’ils font là en plein milieu de la nuit ? Cela fera l’affaire. Je pose mon tapis de sol et m’allonge.
Une heure plus tard, je pars vers la majestueuse gare centrale pour dormir au chaud. Ce lieu offre de nombreux endroits où s’allonger, et j’en trouve un contre la grille de fer baissée d’un magasin. Cependant, un groupe d’employés de la sécurité me chasse.
Soudain, je me rends compte que mon train part d’une autre gare de la ville. Je me remets en selle et passe à nouveau devant le Duomo, alors que le soleil se lève. Le décor est magnifique et il n’y a presque personne sur la place. C’est pour cela que je prends le temps d’admirer l’édifice qui est de taille assez modeste, mais dont la façade est très finement décorée.
Cette nuit à Milan a été fascinante. En revanche, je n’ai rencontré personne depuis mon départ de Bordeaux, ce qui me pèse.
![Duomo à Milan](https://pierrelereporter.com/wp-content/uploads/2025/01/20241102_075202-768x1024.webp)
Pendant le trajet direct de Milan à Foggia, quand je ne dors pas, je profite des paysages qui défilent, d’abord la campagne puis la cote Adriatique. À l’arrivée, je suis ravi de remonter sur mon vélo après avoir passé toute la journée dans le train. Il fait nuit depuis 30 minutes. Dans la petite ville, les yeux sur Google Maps, je roule sur une voie partagée avec les voitures, puis rejoins une large piste cyclable située au milieu de la route.
Ensuite, l’itinéraire suit une route non éclairée traversant une zone rurale. Sur celle-ci, je roule pendant plusieurs kilomètres avec un émigré de Guinée Conakry, dont le vélo n’a pas de phares. Cela m’inquiète pour lui. Je ralentis pour qu’il puisse être éclairé par mes puissantes lumières. Dans l’obscurité qui entoure la longue route, il doit y avoir des champs à perte de vue.
Après avoir parcouru 10 km, le portail rouge, situé au bord de la route de la campagne, apparaît. Je découvre une allée centrale bordée d’arbustes et, au bout, une petite maison. L’endroit a un caractère mystérieux, car il est plongé dans l’obscurité, mais il est en même temps accueillant. Mon portable à la main, j’éclaire le chemin pour voir où je mets les pieds. Les arbres fruitiers ne sont pas visibles.
Après avoir rempli mes bidons d’eau à une fontaine indiquée par Antonio, je vais faire des courses dans un petit bourg. Il y a quelques commerces, dont un restaurant devant lequel des locaux sont assis à une table. Je rentre dans la supérette.
« Tu connais Antonio ? »
Les deux hommes qui tiennent le commerce m’ont reconnu à ma tenue : legging, chaussures de sport et k-way. Ils me parlent en italien. Je suis ravi d’échanger quelques mots dans cette langue, que je maîtrise peu. L’un d’eux m’offre des ailes de poulet cuisinées. Voyager à l’étranger à vélo est simplement génial.
Après avoir pique-niqué dans le jardin, à moitié éclairé par les lumières de la route, je vais m’installer dans la tente.
La nuit est excellente, et, lorsque le soleil et moi, nous nous levons, le jardin se dévoile sous mes yeux. Il y a des arbres des deux côtés de l’allée centrale. Certains ont des fruits, comme des oranges, des clémentines et des grenades. En revanche, les figuiers et les plants de tomates n’ont rien à offrir.
Derrière la petite maison s’étend un champ. Je suis estomaqué par la beauté et le calme de la nature. Ce cadre idyllique me donne envie d’acheter un terrain à la campagne pour y cultiver des fruits et légumes.
![Champs à Foggia, Pouilles, Italie](https://pierrelereporter.com/wp-content/uploads/2025/01/20241103_065833-1024x768.webp)
Je vais cueillir des oranges et une grenade, puis je prépare le thé sur mon réchaud. Quel endroit magique, sous les pins, pour un petit-déjeuner. L’orange est délicieuse, mais la grenade, bien que rafraîchissante, manque de goût. Je prends deux agrumes de plus, en prévision de la suite de mon trajet.
En rangeant ma tente, j’entends un homme, accompagné d’un chien, dans le jardin. Il s’agit d’un travailleur. Après avoir échangé quelques mots avec lui, je me remets en route, vers la petite gare d’Incoronata, où le train pour Bari va bientôt passer.
Bilan de mon expérience
Cette nuit a été la seule que j’ai passée chez quelqu’un connu via Warmshowers. J’aurais aimé loger chez un cycliste à Athènes, mon lieu de séjour de la fin de mon voyage. Malheureusement, sur les 4 personnes contactées, une seule m’a répondu, plusieurs jours après que j’aie réservé mon Airbnb.
D’après moi, les avantages de la plateforme sont :
- La facilité d’utilisation.
- Le montant abordable des frais d’inscription et la gratuité des services d’hébergement.
- La possibilité faire des rencontres enrichissantes avec des personnes venant de l’autre bout du monde et avec des locaux, ce qui est un de mes objectifs quand je voyage.
- L’occasion de vivre des expériences inoubliables dans des lieux sublimes.
En revanche, gardez en tête que ce n’est pas une solution d’hébergement fiable. En effet, par définition, elle repose sur la bonne volonté et la disponibilité des gens. Par ailleurs, comme me l’a dit Avner, le taux de pénétration de la plateforme est très variable en fonction des pays. Par exemple, il m’a été impossible de trouver un hôte dans les grandes métropoles grecques, sans doute parce que celles-ci ne sont pas adaptées aux vélos.
À l’avenir, je contacterai autant d’hôtes que possible, au moins plusieurs jours avant mon arrivée. Cependant, je prévoirai d’autres options d’hébergement, comme le bivouac ou le camping.
Et vous, avez-vous déjà essayé Warmshowers ? Qu’en avez-vous pensé ? Dites-le en commentaires !